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Alain Juppé au Conseil constitutionnel : une grande expérience du droit pénal…

Lutte de classe et gilets jaunes : Les grandes manoeuvres du Capital

samedi 16 février 2019 par Jean Lévy

Richard Ferrand, président de l’actuelle Assemblée Nationale vient donc d’utiliser son pouvoir de nomination au Conseil constitutionnel pour y envoyer Alain Juppé. Extraordinaire petite séquence concoctée par Emmanuel Macron dont personne ne pourrait croire qu’il n’est pas l’organisateur de ce qui constitue quand même une nouvelle preuve de son absence totale de principe. Nous avons là un ancien socialiste sur lequel pèsent de très lourds soupçons d’infractions pénales, mais qui bénéficiant pour l’instant de la protection de la haute fonction publique judiciaire, propulse à la Cour suprême de notre pays un personnage condamné par la justice en application du chapitre des « atteintes à la probité » du Code pénal, qui a fait la démonstration dans le passé de ses rapports très élastiques avec la morale et le droit.

Ainsi Alain Juppé va entrer au Conseil constitutionnel, la cour suprême chargée de vérifier la légalité des textes votés par le Parlement et si ceux-ci sont conformes à l’esprit et à la lettre de la Constitution de la Vème république.

Pourtant, il y a quinze ans

Alain Juppé a été jugé coupable pour "faits de prise illégale d’intérêts"

A-t-il, de ce fait, toutes les qualités pour juger impartialement aujourd’hui les lois votées par le Parlement ?

Rappelons les faits :

Le 30 janvier 2004, Alain Juppé, président de l’UMP (Union pour un mouvement populaire), parti au pouvoir en France, et maire de Bordeaux, a été jugé coupable par la chambre correctionnelle de Nanterre pour ’faits de prise illégale d’intérêts.’ Il s’est vu infliger une peine de prison de dix huit mois avec sursis assortie d’une perte de ses droits civiques, ce qui entraîne automatiquement une peine d’inéligibilité de dix ans.

Le choix d’une telle personnalité par l’Assemblée nationale pose problème. Proposée par Richard Ferrand, son président, lui-même associé à une affaire de prise illégale d’intérêt, cette nomination laisse les Français songeurs.

Pourquoi le maire de Bordeaux jusqu’à ce jour a-t-il été choisi ?
Pourquoi sortir du placard un vieux renard de la droite bien bourgeoise, qui semblait enterré à Bordeaux ?

Une nouvelle affaire de "copains et de coquins" semble une explication un peu courte. Et si cette nomination illustrait une nouvelle alliance autour d’Emmanuel Macron ? Le Président de la République sent sa base électorale s’effriter. Des "Marcheurs" sont fatigués. Nombre de ses proches collaborateurs, amis personnels du Président, sont priés de quitter le navire.

Selon "Challenge’s", l’équipe présidentielle va être totalement renouvelée. Ils sont congédiés les Stéphane Séjourné, Barbara Frugier, Sylvain Fort, jusqu’à l’ami très cher du Président, Ismaël Emelien. Ils sont remplacés par des cadres des entreprises du CAC 40, prêtés par LVMH ou Havas...

Et le sort d’Alexis Kohler, le fidèle entre les fidèles, serait lui-même scellé.

L’irruption sur la scène sociale des gilets jaunes a changé la donne. L’ampleur du mouvement, sa radicalité, le soutien massif qu’il a dans l’opinion, ont donné des sueurs froides au big business. Celui-ci a sifflé la fin de partie. Terminée la fine équipe des Rastignac de l’entourage à Macron. Le Medef veut des gens sérieux, qui ont l’expérience des grands groupes privés.

Le Medef, par la voix de son président, Geoffroy Roux de Bézieux, rappelle la feuille de route assignée à l’Élysée et l’urgence avec laquelle celle-ci doit être réalisée

Emmanuel Macron a été choisi par l’oligarchie financière pour casser le cadre économique, social et politique de la France, hérité de plus d’un siècle de luttes populaires. C’est ce que le locataire de l’Élysée nomme ses "réformes". L’objectif, c’est d’imposer aux Français une société à la Thatcher où les conquêtes ouvrières seront fracassées, réduites à néant. Ce qu’un ancien dirigeant du Medef appelait de ses vœox depuis des années..

Citons les propos de Denis Kessler, tenus en décembre 2011 :

Le modèle social français est le pur produit du Conseil national de la Résistance. Un compromis entre gaullistes et communistes. Il est grand temps de le réformer, et le gouvernement s’y emploie.

Les annonces successives des différentes réformes par le gouvernement peuvent donner une impression de patchwork, tant elles paraissent variées, d’importance inégale, et de portées diverses : statut de la fonction publique, régimes spéciaux de retraite, refonte de la Sécurité sociale, paritarisme...

A y regarder de plus près, on constate qu’il y a une profonde unité à ce programme ambitieux. La liste des réformes ? C’est simple, prenez tout ce qui a été mis en place entre 1944 et 1952, sans exception. Elle est là. Il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945, et de défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance.

Qui n’y verrait pas un résumé de la politique menée au cours de cette dernière décennie par les gouvernements successifs, tant par Chirac, Sarkozy, Hollande et aujourd’hui Macron ?

Le mouvement des gilets jaunes va-t-il entraver le processus ?

Le président de la République a été désigné par ses pairs pour accélérer le rythme de la contre-révolution sociale afin d’en niveler le sol.

Le changement de personnel à l’Élysée exprime la volonté du capital financier de faire face au mouvement social avec une volonté accrue d’y mettre un terme. La violente répression policière et judiciaire représente un premier volet de la contre-offensive du pouvoir.

Il reste à finaliser les "réformes" de la société française. Macron a été chargé de les mettre en œovre. Elles visent les retraites, la sécu, le chômage, la privatisation de ce qui reste du bien public. Le Medef s’impatiente. "Le Monde", daté du 14 février, s’en fait largement l’écho. Sa une et deux pages entières sont consacrées au soutien renouvelé des patrons à Macron. Et cela pour atteindre - et vite- les objectifs pour lesquels celui-ci a été porté au pouvoir. Il faut élargir la base électorale du président de la République, écornée largement par le mouvement des gilets jaunes.

L’objectif, c’est de faire appel au renfort de la droite traditionnelle, en clair à l’électorat Fillon, fortement étrillé lors du scrutin présidentiel par les "Marcheurs". Il faut se rappeler de la teneur du programme du candidat des Républicains : sur le plan social et économique, une feuille de papier à cigarette le séparait de celui de Macron. Et ce n’est pas un hasard si les deux candidats étaient primitivement hébergé à l’Institut Montaigne, lié à AXA...

Le frémissement perçu dans les derniers sondages en faveur de Macron, et mis en musique par le chœur des médias, n’est-t-il pas simplement la traduction mathématique du rapprochement entre les factions de la grande bourgeoisie ?

A quelques mois du scrutin européen, la désignation d’Alain Juppé au Conseil constitutionnel n’est donc pas, dans cette perspective, anodin.

   

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