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Iran : L’impudence de Florence Parly

Remarque sur un médi du 7 septembre 2019

dimanche 8 septembre 2019 par Philippe Arnaud

Hier, sur Arte, j’ai entendu la ministre des armées, Florence Parly, parler de la décision de l’Iran d’augmenter de nouveau sa production d’uranium, en contravention avec les accords de Vienne, conclus en juillet 2015. Et Florence Parly de dire qu’il fallait "ramener l’Iran au respect de l’accord de Vienne".

Remarque 1. Florence Parly ne manque pas d’impudence en inversant ainsi la chaîne des causalités (et, partant, des responsabilités). Quelqu’un qui l’écouterait en ignorant les événements survenus depuis cet accord de Vienne ne manquerait pas de penser que l’Iran a violé cet accord par malignité. Or, c’est bien, d’abord, le retrait unilatéral des États-Unis, en mai 2018, en violation de leur propre signature, qui a été, ensuite - mais ensuite seulement - l’élément déclencheur de la décision de l’Iran ! Ce sont les États-Unis et non pas l’Iran qu’il faudrait ramener au respect de cet accord.

Remarque 2. Florence Parly ne manque pas non plus d’impudence en demandant que l’Iran respecte l’accord de Vienne alors que ni la France ni l’Europe n’ont fait quoi que ce soit pour aider l’Iran à résister aux sanctions américaines. Les entreprises françaises se sont retirées d’Iran, la queue entre les jambes, au claquement de doigts de Donald Trump, et les Européens ont été incapables de mettre sur pied l’accord (qui, au demeurent était une "usine à gaz") devant permettre aux Iraniens d’échanger leur pétrole contre des produits ou des services européens.

Remarque 3. Florence Parly est coutumière du fait : au mois d’avril de cette année, elle déclarait que les armes françaises vendues à l’Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis [n’étaient] pas utilisées de façon offensive dans la guerre du Yémen. Or, dans ces armes, figuraient des chars Leclerc, des obus-flèches, des Mirage 2000, des radars Cobra, des blindés Aravis, des hélicoptères Cougar et Dauphin, des frégates, des corvettes et des canons Caesar. [Ce canon est un canon automoteur - c’est-à-dire d’une très grande mobilité - de 155 mm de calibre, dont les obus, lorsque ce sont des obus-roquettes, peuvent porter à 50 km, à un rythme de 6 à 8 par minute. Dans son genre, c’est un des canons les plus performants du monde].

Remarque 4. A ce point-là, la capacité de Florence Parly à prendre les Français - et, de façon générale, les auditeurs - pour des imbéciles, tient de la performance. En effet, la guerre du Yémen dure depuis 2014 et Florence Parly l’ignorerait ? Depuis 2014, la France livre des armes à deux des belligérants engagés dans cette guerre et Florence Parly évoque ces ventes d’armes comme le ministre de la culture parlerait des prêts consentis par le musée du Louvre au Louvre d’Abou Dhabi. Elle parle des livraisons des chars Leclerc ou des canons Caesar comme elle parlerait du prêt d’un Léonard de Vinci ou d’un Murillo au Louvre d’Abou Dhabi. Elle veut faire croire quoi, aux Français ? Que ces armes sont exposées à l’admiration des foules, dans un grand musée de l’armée, sorte des Invalides du désert ?

Remarque 5. Quel rapport y a-t-il entre ces deux déclarations qui, au demeurant, portent sur deux objets différents ? [Dans un cas, en effet, il s’agit de la négation d’une évidence - l’usage, par les Saoudiens, des armes françaises contre les Yéménites ; dans l’autre cas, c’est le report, sur l’Iran, d’une situation qui incombe en fait aux États-Unis]. Le point commun à ces attitudes est le manque de courage, l’incapacité à assumer ses lâchetés, ses renoncements.

Dans le cas des ventes d’armes, la France a honte de vendre des armes qui servent à tuer des civils et même des combattants bien moins armés que les Saoudiens et les Émiratis. Elle a honte et, pour camoufler sa gêne, elle nie l’évidence. En effet, à quoi servent des armes, si ce n’est à s’en servir, et de surcroît, dans un pays en guerre ? Florence Parly imaginerait-elle que les armes et équipements livrés à l’URSS au titre de la loi du prêt-bail étaient entreposés dans des hangars par l’Armée rouge ?

Dans le cas de l’Iran, la France a honte de n’avoir rien fait pour permettre à l’Iran de contourner les sanctions américaines (soit en ordonnant à ses entreprises de rester en Iran, soit en mettant en place, avec les autres pays européens, un système de troc qui évite les transactions en dollars). Aussi saute-t-elle opportunément l’étape de la violation de l’accord de 2015 par les États-Unis, en 2018, pour en arriver, à l’aise, à l’étape de la violation de ce même accord par les Iraniens - qui n’est que la conséquence de la violation du premier accord.

Et cette lâcheté est même à double fond : car, normalement, c’était au président de la République, au pire au Premier ministre, de s’expliquer, voire d’assumer les livraisons d’armes françaises ou le lâchage de l’Iran. Ce n’était pas à la ministre des armées d’aller au charbon pour le compte de ses supérieurs hiérarchiques.

Remarque 6. Quel est l’autre point commun à ces déclarations ? C’est la soumission, la sujétion, l’asservissement à l’égard de la politique étrangère des États-Unis. Dans la guerre du Yémen, la France a pris le parti des États-Unis, principal soutien de l’Arabie saoudite, contre le Yémen (par ailleurs soutenu par l’Iran). Dans le cas de l’Iran, après quelques effets de manche, quelques déclarations vertueuses (qui ne mangent pas de pain), la France est rentrée dans le rang.

Remarque 7. Aristide Briand eut un mot spirituel sur la politique étrangère de la France (ce mot est peut-être apocryphe mais savoureux). Briand disait : "La France et l’Angleterre doivent être unies comme le cavalier et son cheval". Puis il faisait une pause de quelques secondes et ajoutait : "...l’essentiel est de ne pas être le cheval !"

La conclusion de ce trait d’esprit montre que Briand n’était pas dupe du sens dans lequel s’exerçait la domination. Pour actualiser ce mot en 2019, il suffit de remplacer Angleterre par États-Unis. Sauf qu’aujourd’hui nos gouvernants ne sentent même plus le mors...

   

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