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Combattre l’impérialisme ou ses victimes ?

jeudi 5 mars 2020 par Francis Arzalier (ANC)

Certains militants dans nos rangs répètent à satiété comme pour s’en convaincre que l’Impérialisme est en crise exponentielle, que les mouvements populaires croissent dans le monde entier, et laissent entrevoir sa rapide impuissance. Cet optimisme qui veut être mobilisateur ne serait-il pas plutôt un frein alors qu’on doit entraîner à le combattre ?

La nature de l’impérialisme

D’abord parce que l’Impérialisme est toujours aussi néfaste qu’à l’époque ou Lénine en fit analyse et critique, en tous les continents, où il assure militairement, diplomatiquement, l’exploitation des richesses de peuples entiers, pétrole, minerais, produits agricoles. Il y pérennise ainsi, comme à l’épique coloniale, l’absence d’industries nationales productives dans la majorité des pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique, réduisant leur jeunesse au chômage et à la pauvreté, et l’obligeant de ce fait à l’émigration et ses drames.

Et c’est aussi l’Impérialisme qui fomente guerres et subversions, en finançant les fanatismes religieux et les racismes qu’il prétend combattre. Et s’il est arrivé que ses tentatives de destruction d’un État national échouent, par exemple en Syrie, il a tout de même réussi à disperser et affamer des millions de citoyens syriens. Et la liste est bien plus longue des nations réduites au chaos et à la sujétion : par les guerres impérialistes : l’Irak en 2003, la Libye en 2011 ; par l’étranglement économique, de Cuba depuis 60 ans, de la Bolivie et du Venezuela depuis des années, de l’Iran aujourd’hui, parce que ces nations s’obstinent à désobéir à l’Empire occidental.

L’impérialisme a l’offensive

L’Impérialisme n’a donc pas changé de nature, mais est-il néanmoins en déclin, comme nous le voudrions ? L’évolution récente dans différentes régions du monde dit le contraire. Certes, au Moyen Orient, l’Impérialisme US n’a pas atteint ses objectifs initiaux, notamment grâce à son concurrent russe. Mais il est toujours menaçant économiquement et militairement contre l’Iran, et la nuisance de ses alliés Turcs et Israéliens s’est accrue avec sa complicité en Palestine et en Syrie.

En Amérique latine, ou la vague de gouvernements progressistes semblait irrésistible jusqu’au début du 21eme siècle, les alliés de l’Impérialisme ont reconquis le Brésil, l’Argentine, et la Bolivie. l’Équateur et le Nicaragua risquent de suivre, et le Venezuela "Bolivarien" est fort menacé d’effondrement économique et social. L’offensive de l’Impérialisme US, avec l’aide des bourgeoisies "Latino-Compradores" et de ses alliés européens, dont la France libérale, a marqué des points ces dernières années, et peut rêver de détruire par ricochet le Socialisme à Cuba.

En Asie, l’offensive des USA semble avoir reculé temporairement contre la Corée du Nord, mais se renforce contre son ennemi essentiel, la Chine. Certes, sur les plans économique et commercial, mais plus encore diplomatique, avec des succès notables récents dans la Tentative de création d’une sorte de "cordon sanitaire" anti-chinois. En son centre, l’Inde et son milliard d’hommes, dirigée par le Nationaliste hindouiste Modi, organisateur de pogroms anti-musulmans, qui affiche son affection pour Trump. Mais aussi en tentant d’y attirer d’autres pays du sud-est asiatique, Sri-Lanka, Vietnam, etc…Une sorte de résurrection de l’ancienne OTASE anticommuniste, élargie sur une base nationaliste anti-chinoise à des gouvernements qu’on eut pu croire allergiques à cette tentation, celui du Népal qui se dit maoïste, celui du Vietnam officiellement socialiste, celui du Sri-Lanka de Gauche, incluant des Trotskistes !
Cette offensive diplomatique US est encore loin d’avoir réussi, mais sa seule mise en chantier prouve déjà la déliquescence de la " Gauche " asiatique, comme le désastre bolivien démontre celle des " Gauches " latino-Américaines.

Crise de l’anti-Impérialisme

Car c’est bien de cela qu’il s’agit : l’Impérialisme US et ses alliés ne sont pas plus puissants qu’il y a 20 ans. Ils profitent par contre d’un véritable effondrement des mouvements révolutionnaires et anti-impérialistes dans le monde. Quasi disparition des partis et mouvements d’inspiration marxiste en Afrique, en Amérique, en Asie et en Europe, y compris ceux qui assumaient parfois le pouvoir jusqu’à la décennie 1990. Quand ils subsistent, ce n’est comme en Pologne ou Hongrie que sous la forme de groupuscules courageux mais inaudibles, ou sous les oripeaux mensongers d’un parti autrefois révolutionnaire, qui n’est plus qu’un groupement carriériste et opportuniste, de Dakar à Brazzaville. Les "grands" partis communistes de l’Ouest européen, France, Italie, Espagne, Allemagne, rongés depuis longtemps par cette même maladie mortelle, ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes, et sont bien incapables d’animer un mouvement anti-impérialiste comme il y a une génération.

Certes, des mouvements importants de protestation populaire parcourent ces divers pays épisodiquement, Gilets Jaunes français, Hirak algérien, mobilisations populaires arabes et africaines, du Soudan à l’Égypte, du Burkina à la Tunisie. Mais Ils se révèlent tous incapables de déterminer un objectif politique de transformation sociale, et s’enlisent dans un "dégagisme" ouvert à toutes les manipulations. Ne nous le cachons pas : dans tous les continents, la contre-révolution idéologique libérale l’a emporté temporairement au XXIeme siècle, et l’Impérialisme avec lui. N’est-il pas révélateur à ce sujet de constater la débandade idéologique des journaux et revues supposés incarner les forces anti-impérialistes en France.

On en trouve un exemple parfait dans le dernier numéro (116, nov/dec. 2019) de Recherches Internationales, qui fut longtemps la bible marxiste des militants français contre les méfaits de l’Impérialisme et pour la paix. Ce récent numéro affiche un étonnant débat à propos du Venezuela, un des points chauds en la matière. Passe encore d’y donner la parole à un "expert" qui résume son analyse en un titre digne du Figaro ou de Libération : " Venezuela, du mirage au désastre ". Ce pourrait être pour y dénoncer cette vision simpliste et irrationnelle qui règne en maître sur les "grands" médias français alignés sur Macron et sa Cour libérale. Mais la contribution du responsable de la revue s’y joint pour affirmer qu’il n’est plus de saison d’affirmer notre solidarité avec un peuple indéniablement victime des menées impérialistes. Le titre, déjà, se veut sans ambiguïté :" Tout ce qui bouge aux confins de l’Empire n’est pas forcément rouge."

Le texte décortique ensuite les échecs et insuffisances de l’expérience "Bolivarienne", sans trop s’attarder sur les menées impérialistes qui en sont une des causes. Et il conclut, péremptoire : " la solidarité internationale n’est pas un droit...", en se référant aux " limites et dangers d’un internationalisme irréfléchi." (sic). Cette dérive opportuniste n’est malheureusement pas nouvelle dans une certaine mouvance PCF new-look : En 2003, nous eûmes déjà la surprise de voir certains de ses épigones, engoncés dans la stratégie dite " d’Union des Gauches ", réagir à l’invasion US de l’Irak indépendant en clamant " ni Bush, ni Saddam Hussein", renvoyant ainsi dos à dos l’agresseur impérialiste et la victime.

La même duplicité leur servit à justifier l’inaction lors de la destruction de l’État national libyen par les bombardiers de Sarkozy au nom de l’Occident, sous prétexte que Khadafi était un tyran. Aujourd’hui encore, ils nous abreuvent volontiers des sévices infligés par des mollahs chiites aux femmes de Téhéran pour ne guère combattre l’embargo impérialiste impose à l’Iran.
Une version "light" et hypocrite de la vieille doctrine coloniale, qui justifiait en 1900 la conquête de l’Afrique par la lutte contre l’esclavage, reprise à la fin du XXeme siècle par Kouchner, chantre français du " devoir d’ingérence " occidental, au prétexte hypocrite des Droits de l’Homme.

Tout peuple agressé par l’impérialisme, menacé par lui de pillage et d’asphyxie économique, voire d’invasion militaire, est en droit d’attendre notre soutien solidaire. Les erreurs, les fautes éventuelles de ses dirigeants ne peuvent en aucun cas justifier l’ingérence extérieure, ou l’agression.

Il n’est pas nécessaire pour être solidaire contre les menaces aboyées par Trump de juger que le modèle de socialisme adopté par la Corée du Nord est un idéal à recopier en France : seul le peuple de Corée est habilité à juger de son modèle social et politique.

Lutter contre l’impérialisme

Les risques de conflit militaire majeur, voire nucléaire, sont inhérents à l’Impérialisme. Seules les mobilisations populaires massives peuvent les empêcher de se réaliser, comme elles ont déjà eu l’occasion de le faire, grâce à d’immenses cortèges dans les rues durant les guerres de Corée, du Vietnam, etc…

Elles en sont bien incapables pour l’instant, pour l’unique raison que les organisations révolutionnaires ou pacifistes nécessaires à les organiser sont pour l’instant un champ de ruines.

Notre tâche de militants est donc de les reconstruire, sur des objectifs clairs qui nous réunissent, au-delà de nos différences : les impérialismes enfantent l’inégalité entre les peuples et les guerres, nous devons les combattre partout où ils se manifestent, pour la paix et le droit exclusif de chaque nation de décider seule de son destin et de ses lois, sans ingérence extérieure.

Avec pour premier impératif de mobiliser les citoyens français contre l’intervention des soldats français de l’opération Barkhane en Afrique sahélienne, sous prétexte d’y combattre le fanatisme islamiste, alors qu’il ne fait que l’exacerber.

   

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