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1984 - 2020 : d’Orwell à Jupiter

mardi 2 juin 2020 par Guillaume Berlat pour Proche&moyen-orient

« Big Brother vous regarde / La guerre, c’est la paix / La liberté, c’est l’esclavage / L’ignorance, c’est la force » (1984, George Orwell).
« C’est dans le vide la pensée que s’inscrit le mal »(Hannah Arendt).
Dans cette époque d’aculturation et d’infantilisation que nous connaissons aujourd’hui, le mal n’a aucune difficulté à pénétrer des esprits peu portés à la réflexion, à la critique, au débat.

Pourquoi perdre son temps à penser alors que la bien-pensance le fait pour vous ?
Pourquoi remettre en cause ce que vous assènent les télévisions d’abrutissement et de catastrophisme en continu alors le clergé médiatique vous les certifie du label vérité révélée ?
Pourquoi ne pas se laisser porter par l’air du temps alors que nos dirigeants nous promettaient, encore il y a peu, de déguster les délices de la « mondialisation heureuse », du village planétaire ?
Pourquoi craindre les dérives liberticides d’un pouvoir aux abois alors que nous avons la chance de vivre dans un état de droit sous le contrôle du meilleur gardien des libertés publiques qu’est le Conseil d’État ?
Pourquoi ne pas dormir sur ses deux oreilles alors que le Conseil d’État et le Conseil Constitutionnel font assaut de servilité pour plaire au prince qui nous gouverne ?
Pourquoi ne pas croire que nous vivons dans un état de droit, devenu au fil du temps une imposture en tout cas l’archétype du mot creux, au sein de la patrie autoproclamée des droits de l’homme ?

Force est de constater que, dans l’hexagone, nous observons un fossé entre la théorie et la pratique. La démocratie française ressemble de plus en plus à une vulgaire démocrature, une démocratie Potemkine qui ne tient que par des apparences trompeuses. La démocratie française n’est plus que l’ombre d’elle-même, accaparée par une Noblesse d’État, une Caste prédatrice en laquelle les citoyens n’ont plus confiance [1].

Comment la définir simplement ?

En faisant appel à un auteur célèbre qui nous dit que : « le parti recherche le pouvoir pour le pouvoir, exclusivement pour le pouvoir. Le bien des autres ne l’intéresse pas ».
Qui est-il et quand a-t-il écrit l’une de ses œuvres maîtresses ?
Il s’agit de George Orwell dans 1984 publié au Royaume-Uni en 1949, traduit en français en 1950 [2]. Dans ses diverses publications, l’auteur entend faire « de l’écrit politique un art » et dénoncer les désordres politiques du XXe siècle, les dérives des totalitarismes et les dangers des manipulations de la pensée.

L’Histoire ne serait-elle qu’un éternel recommencement ?

Aujourd’hui, le monde traverse une crise globale. Les démocraties violent subrepticement les principes fondamentaux du droit pour rendre leur tâche plus aisée, pour contourner les libertés des citoyens [3]. Pire encore, à coup de communication outrancière, elles mettent en place une police de la pensée, une armée de censeurs, une légion de folliculaires destinées à formater la pensée des êtres humains.

Comme existe le prêt-à-porter dans le domaine de l’habillement, existe désormais le prêt-à-penser dans le domaine de la politique. La vie de notre société se nourrit de dogmes infaillibles, de liturgies désuètes véhiculées par des réseaux qui n’ont de sociaux que le nom tant ils sont intrinsèquement asociaux. Chaque citoyen est le petit doigt sur la couture du pantalon, aux ordres d’un pouvoir omnipotent et omniscient qui pense pour vous et vous signifie ce qui est bon et mauvais pour vous.

Cette atmosphère délétère, anxiogène s’apparente, par bien des égards, au monde orwellien de « 1984 ». Ce monde de la surveillance où « Big Brother vous regarde ». Ce monde du politiquement correct où seule compte la « novlangue » Ce monde du cadenassage des esprits où sévit la « Police de la Pensée ». Ce monde de la certification des bons articles de presse par le pouvoir qui s’apparente au « ministère de la Vérité ». Ce monde des « fake news » où nos dirigeants « en pleine conscience et avec une absolue bonne foi émettent des mensonges soigneusement agencés ».

Ce monde du passé recomposé où « l’Histoire toute entière est un palimpseste [4] gratté et réécrit aussi souvent que c’est nécessaire ».
Ce monde de la duplicité du en même temps où « le mensonge choisi passe ensuite aux archives et devient vérité permanente ».
Ce monde de l’uniformisation où « le véritable but de la novlangue est de restreindre les limites de la pensée ».
Ce monde du globish où « c’est une belle chose que la destruction des mots ».
Ce monde de l’approximation qui se vante d’être celui où « plus vaste est la compréhension, plus profonde est l’illusion ».
Ce monde des apparences où « le ministère de la Paix s’occupe de la guerre, celui de la Vérité des mensonges, celui de l’Amour, de la torture, celui de l’Abondance, de la famine ».

En un mot, notre monde d’après n’est-il pas celui où « la stupidité est aussi nécessaire que l’intelligence et aussi difficile à atteindre » ? Celui où la sphère médiatique est en train d’enfler – au détriment du reste – et finira peut-être par éclater.

« On avale à pleine gorgée le mensonge qui nous flatte et l’on boit goutte à goutte une vérité qui nous est amère » (Denis Diderot).

Notre faute la plus essentielle consiste dans notre amnésie consentie. Une fois encore que de similitudes entre le monde jupitérien et le monde orwellien dont les citations ont été portées en italiques dans le texte pour mieux les mettre en relief.

Quelles merveilleuses comparaisons entre deux époques éloignées de soixante-dix ans, marquées par la stérilisation de la pensée, le déni du réel, le mensonge d’État, le scandale d’État…

Vous l’aurez compris, une lecture ou une relecture de « 1984 » en 2020, en période de déconfinement, est incontournable pour faire un bond dans le temps, d’Orwell à Jupiter, de l’ancien au nouveau monde.
Le tout dans l’attente d’un meilleur lendemain qui n’est pas venu et ne viendra pas.


Voir en ligne : https://prochetmoyen-orient.ch/orie...


[1Pierre Jaxel-Truer, Covid-19 : méfiance des Français vis-à-vis des acteurs de la crise, Le Monde, 21-22 mai 2020, p. 8.

[2George Orwell, 1984, Gallimard, 1950.

[3Paul Cassia, Demain les drones, Le Blog de Paul Cassia, www.mediapart.fr , 20 mai 2020.

[4Parchemin dont on a effacé la première écriture pour pouvoir écrire un nouveau texte.

   

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