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Ambassadeur, recteur ... en fait Macron nomme qui il veut !

Le nouveau recteur de Paris est au conseil scientifique d’un lobby qui veut... payer les profs à la "performance"

mardi 28 juillet 2020 par David Pargamin

Nommé ce 22 juillet, le nouveau recteur de Paris, Christophe Kerrero, est au conseil scientifique de l’Ifrap, un think tank libéral qui veut... rémunérer les enseignants à la "performance".
Et supprimer les rectorats.
Cocasse...

Le cabinet de Jean-Michel Blanquer est un formidable accélérateur de carrière. Le mercredi 22 juillet, le président de la République a procédé à plusieurs nominations, dont celle de Christophe Kerrero, ancien directeur de cabinet du ministre de l’Éducation nationale, comme recteur de l’académie de Paris.

Le haut fonctionnaire est parachuté à la tête de la plus grande région scolaire, avec plus de deux millions d’élèves et le plus vaste regroupement d’universités de tout le territoire. Il remplace Gilles Pécout, nommé il y a quatre ans, qui a été démis de ses fonctions.
Cette nomination bouscule le petit monde de l’éducation, où l’arrivée de Christophe Kerrero fait grincer.

« Pour la première fois de son histoire, le recteur de l’académie de Paris n’est ni un chercheur, ni un professeur d’université , fait remarquer Thierry Ananou, pour le syndicat national des enseignements du second degré (SNES). C’est une franche rupture avec la tradition qui veut que le recteur possède au moins une habilitation à diriger des recherches. C’est l’aboutissement d’une carrière universitaire et administrative ».

Un avis partagé par l’ancien recteur de l’académie de Versailles, Pierre-Yves Duwoye, qui épingle « un CV très loin de l’expérience de direction de haut niveau de ses prédécesseurs ». « Cultivé, mais plein de suffisance », enfonce ce haut-fonctionnaire qui fut directeur de cabinet du ministre Vincent Peillon. (…) De ce point de vue, c’est le meilleur élève de la classe macronienne ».

Christophe Kerrero bénéficie d’un décret publié le 4 octobre 2018 par... son ancien patron, qui supprime deux conditions principales pour devenir recteur d’académie : posséder un doctorat et avoir au moins dix ans d’expérience dans l’éducation (ou trois ans comme directeur d’administration centrale).

Désormais, le gouvernement peut nommer 40% de recteurs non-universitaires.

Ces derniers mois, le ministre a pu recaser plusieurs proches de l’exécutif dans les différents rectorats d’Ile de France et du Nord : Charline Avenel, une camarade de promotion d’Emmanuel Macron à l’ENA, à Versailles, ou plus récemment, Raphaël Müller, son ex-directeur-adjoint de cabinet, à Amiens.

Au conseil scientifique de l’Ifrap

Autre élément qui suscite la perplexité, Christophe Kerrero fait partie du conseil scientifique de l’Ifrap. Un « institut de recherche », obsédé par la réforme des « administrations et des politiques publiques ».
Dans une enquête menée il y a deux ans, Marianne relevait l’absence de scientifiques de cette organisation, inscrite au registre des représentants d’intérêts au Parlement, publié par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).

Leurs idées en matière d’éducation sont détonantes.
Dans les notes publiées sur son site, l’Ifrap propose notamment de « faciliter le financement des écoles hors contrat » et de faire travailler davantage les professeurs, en leur permettant « d’enseigner plusieurs matières » à la fois.
La fondation appelle à mettre en place des établissements financés au nombre d’élèves, sur la base d’un « forfait », en totale autonomie de la part des proviseurs : « Ces établissements seraient libres de gérer leurs bâtiments, leur budget et le recrutement de leurs personnels à qui ils seront chargés de verser les salaires tout en s’engageant à suivre le programme et la pédagogie de l’Éducation nationale ».

Mieux, l’Ifrap propose également de rémunérer les enseignants... à la « performance ».
Comment ?
En soumettant jusqu’à 30% de leur salaire à des critères comme le niveau des élèves, « les échos des parents d’élèves », ou « voire plus directement sur le jugement des élèves eux-mêmes sur l’enseignement qu’ils reçoivent ». Tout un programme.
Plus cocasse encore, l’Ifrap proposait en 2018 de « supprimer les rectorats et les académies »...

"mettre le système éducatif en relative tension"

Le nouveau recteur de Paris ne s’est jamais interdit de reprendre les arguments de l’Ifrap. Bien au contraire, dans un entretien donné à SOS-Education en 2016, l’inspecteur général résume son programme pour l’éducation nationale, dans lequel il propose de « mettre le système éducatif en relative tension ». Comment ?
En publiant les résultats des évaluations des élèves par établissement « dans une logique d’open data ». Dans cet entretien, il se dit également préoccupé par le niveau des élèves, aggravé par le « relativisme culturel », « l’égalitarisme niveleur » et le « pédagogisme trissotant » du « système ».

Autre projet, laisser un tiers du programme au collège à la libre appréciation des établissements. Une interview aujourd’hui supprimée.

Les élucubrations d’un néophyte ? Pas du tout.
En vingt ans, Christophe Kerrero a écumé la plupart des postes-clés, rue de Grenelle. Une carrière couronnée par le grade d’inspecteur général de l’éducation nationale, en 2016, la plus haute fonction au ministère. Il fut d’abord conseiller du ministre Luc Chatel, de 2009 à 2012. En 2016, il a été nommé à la direction des lycées au conseil régional d’Ile-de-France, auprès de Valérie Pécresse.

Jean-Michel Blanquer, "esprit supérieur"

En tant que directeur de cabinet de Jean-Michel Blanquer, Christophe Kerrero aura surtout brillé auprès des syndicats... par sa discrétion.
« J’ai rarement vu un directeur de cabinet aussi absent », déplore Frédérique Rolet, secrétaire nationale du SNES, qui s’en est ouverte au ministre. Avec tous les dossiers qui attendent le recteur à la rentrée, nous espérons sincèrement que M. Kerrero saura mettre en place le dialogue qui nous a manqué ces dernières années. »

Agrégé de lettres modernes, le nouveau recteur aura en tout cas su trouver les mots pour amadouer le ministre de l’Éducation.
Dans son livre, Démocratie, école et société, publié en 2016, le fonctionnaire réservait cette dédicace touchante à « Jean-Michel Blanquer, esprit supérieur qui vous entraîne avec lui pour vous mener au-delà de vous-même dans de formidables aventures humaines ». Un honneur que le ministre lui rendait, l’année suivante, en le nommant à la tête de son cabinet.


Voir en ligne : https://www.marianne.net/societe/le...

   

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