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Histoires d’Amérique....et de France : un vent nouveau souffle sur l’Amérique " latine ".

mardi 22 juin 2021 par Francis Arzalier (ANC)

Précisons tout d’abord qu’il s’agit du continent entier, dont les trois quarts sont constitués de l’Amérique dite latine, parce qu’elle fut autrefois colonise par Portugais et Espagnols, qui lui ont légué en héritage leurs langues : enseignées à l’école, imposées par les États, Portugais et Espagnol ont fini par y être les idiomes plus répandus, même si des millions de paysans et de mineurs utilisent encore quotidiennement leurs langues amérindiennes, des plateaux boliviens aux forêts d’Amazonie.

Car la diversité " indienne" est largement présente encore dans tous ces peuples d’Amérique, même si les bourgeoisies se veulent volontiers de culture " européenne".

Les États-Unis sont une autre Amérique, celle des " Gringos " envahisseurs et exploiteurs depuis deux siècles. Rien de plus exaspérant pour les citoyens si divers, de Mexico à Buenos Aires, de Rio à Quito, que cette manie française de qualifier "d’Américains" les seuls Étatsuniens !
Une habitude d’autant plus inacceptable que l’histoire des nations d’Amérique Latine, de Cuba au Mexique, du Brésil au Chili, se résume depuis deux siècles à d’incessants combats contre l’Impérialisme des USA !

Comme partout, dans leur diversité, les pays " latinos "ont eu une histoire en dents de scie, une période de progrès politiques et sociaux, avant une de régression, puis un rebond démocratique, etc…

Durant la première moitié du XIXème siècle, grâce aux déclins des puissances européennes affaiblies par les guerres napoléoniennes, ce fut la vague des indépendances, victoires populaires incarnées par des leaders progressistes comme Bolivar, dont le nom est encore utilisé comme un symbole par les luttes contre l’Impérialisme.

Un Impérialisme qui s’incarna dès la deuxième partie du 19éme dans la jeune République nord-américaine, très vite industrialisée et capable militairement d’annexer une bonne partie du Mexique, après avoir exterminé les peuples Amérindiens de son espace, puis de soumettre à ses volontés des lambeaux d’ex-colonies espagnoles, Puerto-Rico, les Philippines, et même l’île de Cuba, théoriquement indépendante.

Dès le début du 20ème siècle, les USA se jugent assez forts pour proclamer par la voix du Président Théodore Roosevelt sous le slogan mensonger " l’Amérique aux Américains " que le continent entier est leur terrain de jeu, à l’exclusion des concurrents européens, Britanniques, Français ou Espagnols…
Et ils ne se privent pas d’y multiplier débarquements armés, et coups d’États, pour y imposer leur domination économique, avec souvent la complicité des bourgeoisies autochtones. Ils prennent ainsi le contrôle total du canal de Panama, qui avait pourtant été construit à l’initiative des autorités françaises.

Durant le même XXème siècle, des mouvements populaires contre l’Impérialisme parcourent l’Amérique latine, comme l’insurrection paysanne de Pancho Villa au Mexique, mais souvent avortent du fait de la complicité des bourgeoisies locales.
Toutefois, après 1930, grâce à l’affaiblissement temporaire des USA du fait de la Grande Crise économique, quelques expériences progressistes parviennent à s’imposer, au Mexique par exemple (nationalisation du pétrole en 1938, accueil des réfugiés républicains espagnols, etc…).

A l’issue de la Deuxième Guerre Mondiale, les USA ont renforcé leur domination économique, et politique en Amérique latine, et leur emprise se traduit souvent par des interventions armées, en soutien à de féroces dictatures (Somoza au Nicaragua, Battista à Cuba, régimes militaires au Brésil, en Argentine, au Chili avec Pinochet, etc… Tous inspirés par les théoriciens ultra-Libéraux US).

De multiples mouvements populaires ont lieu, mais ne parviennent pas à se maintenir au pouvoir et à réaliser les réformes envisagées, qu’ils soient nés d’une victoire électorale (Allende au Chili, renversé par le coup d’État sanglant de Pinochet), ou par des insurrections armées (les FARC en Colombie, les maquis guevaristes en Bolivie, les Montaneros en Argentine, etc…).

Seule exception, la Révolution armée Cubaine de 1959, dirigée par les frères Castro et les Communistes Cubains, qui malgré la guerre économique et militaire menée contre elle par les USA, fait vivre un État Socialiste et anti-impérialiste à 1 heure d’avion de Miami, malgré l’effondrement de l’URSS qui le soutenait.

Vague de gauche en Amérique latine

Avec la disparition de l’URSS en 1990, l’impérialisme US et ses idéologues, convaincus de leur victoire définitive, proclamaient volontiers que le Capitalisme était " la fin de l’histoire"). Dès le tournant du siècle, l’Amérique latine démontra l’illusion : une vague de luttes populaires parcourut le continent "latino", et donna naissance à de nombreux gouvernements élus "de Gauche", influencés par le marxisme Cubain, ou tout au moins le réformisme social-démocrate, cherchant l’indépendance économique par les nationalisations anti-impérialistes.
Cette nouvelle politique se tourna vers la redistribution aux citoyens les plus pauvres des bénéfices engrangés par l’État grâce à la flambée du prix des matières premières.

Ce fut d’abord l’arrivée au pouvoir au Venezuela de Chavez, militaire charismatique et son "Socialisme Bolivarien", dont la popularité tenait à ses mesures de nationalisation du pétrole, et a une lutte efficace contre la pauvreté. Mais ce furent aussi les gouvernements " de Gauche " de Corréa en Équateur, d’Évo Morales en Bolivie, et surtout le syndicaliste Lula au Brésil, le géant de l’Amérique du Sud.

Malgré les pressions économiques et diplomatiques des Impérialismes (embargos), ces gouvernements purent réaliser une partie de leurs objectifs, notamment contre la pauvreté urbaine et rurale, grâce à la solidarité avec Cuba Socialiste (aide médicale et éducative). Ils ont démontré que l’Impérialisme n’était pas tout-puissant, et qu’un processus d’indépendance réelle pouvait s’imposer malgré lui, s’il avait un soutien populaire massif.

Ces réussites indéniables créèrent même parmi les militants européens ou africains déprimés par le déferlement chez eux de la contre-révolution libérale des illusions sur la pérennité d’un "socialisme du XXIème siècle" initié à Rio et Caracas, qui corrigerait les erreurs du "socialisme réel " du XXème siècle.

Reflux des gauches latinos

En fait, la Deuxième décennie du 21ème siècle révèle les faiblesses de ces "expériences de Gauche" qui s’effondrent l’une après l’autre, minées par la corruption de certains dirigeants, et le verbiage réformiste, mais aussi par l’opposition des bourgeoisies autochtones, civiles ou militaires, relayées par des magistrats, inféodées aux USA, et surtout par les pénuries provoquées par la chute du prix des matières premières.

C’est d’abord le PT de Lula qui perd les élections au profit de l’extrême-droite, a l’issue des condamnations du Président pour corruption. Mais aussi de Corréa, lui aussi accusé de corruption, et Evo Morales, dont le poulain Lénin (!) Moreno se rallie aux diktats libéraux.

Le seul gouvernement " Socialiste " résistant à ce reflux de la Gauche Bolivarienne est celui de Maduro au Venezuela, qui poursuit tant bien que mal son œuvre, malgré les pénuries provoquées par l’embargo de tous les Impérialismes occidentaux (y compris celui de la France) et les assauts de la bourgeoisie locale.

Le paradoxe américain de 2021

Étonnamment, alors que l’Europe connait à l’issue des deux ans d’épidémie Covid une forte vague droitière, les mouvements anti-impérialistes d’Amérique Latine entament la troisième décennie du siècle par une série de victoires électorales, couronnant de multiples luttes populaires.

  • - En octobre 2020, le parti d’Evo Morales (MAS mouvement vers le socialisme) a repris la majorité et chasse les putschistes d’extrême droite.
  • - En octobre 2020, succédant à de vigoureuses mobilisations dans les rues, les élections constituantes au Chili ont été une lourde défaite pour les héritiers ultra-libéraux de Pinochet, et le PC chilien est même arrivé en tête dans la capitale.
  • - En Colombie, le gouvernement de Droite a dû retirer son projet de réforme fiscale devant la colère populaire.
  • - Le scrutin le plus traumatisant pour la Droite latino est l’élection de l’instituteur rural Pedro Castillo comme Président du Pérou !
  • - Et la magistrature brésilienne a abandonné les condamnations mensongères contre Lula au Brésil devant les protestations populaires.
  • - Au Mexique, la Gauche réformiste de Lopez Obrador conserve sa majorité, malgré l’insécurité liée aux trafics de drogue et de migrants.
  • - Et surtout, le régime Bolivarien du Venezuela, et le Socialisme Cubain sont toujours vivants malgré les embargos impérialistes, et persisteront tant qu’ils conserveront leur soutien populaire.

Pas d’euphorie, ne prenons pas nos désirs pour des réalités : Le pro-cubain Castillo n’a que quelques milliers de suffrages d’avance sur l’affairiste corrompue Fujimori, digne représentante de la bourgeoisie " compradore " alignée sur Washington.
Et la réélection du candidat de Droite en Équateur montre que ces nouvelles tendances anti-impérialistes sont fragiles.

Mais le reflux à Droite, la période où gagnait partout au sud du Mexique la soumission à l’Impérialisme s’achève. Et nous observerons cet espoir latino avec intérêt et solidarité, car il est aussi notre espoir. Tout est possible aux peuples, y compris par les urnes, quand le niveau préalable des luttes sociales et nationales est suffisant pour stopper les réactions impérialistes.

Cette leçon venue d’Amérique latine est bien utile à la France actuelle, engluée dans des élections locales, régionales et nationales perdues d’avance, tant est grand le discrédit des politiciens ralliés aux dogmes libéraux, et la faiblesse des organisations de Gauche, qui trop souvent ne sont plus guère en phase avec les luttes.

La seule issue est de les reconstruire, solides et démocratiques, sur des bases réellement marxistes, et l’espoir alors renaîtra.

21 juin 2021

   

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